Le lac Song







Chaleureux et jovial, Kuba nous amène à la station centrale de bus de Bishkek. Après les négociations de mise, nous montons dans un taxi partagé avec trois kirghizes, direction le lac Son Kul. Âgée de près de 30 ans, probablement blanche à l'origine, le pare-brise fendu de part en part, l'engin aux ressources insoupçonnées défie les routes cahoteuses et nous élève péniblement  vers notre éden du jour. Les montagnes arides se succèdent et ne se ressemblent pas. On regarde avidement à travers les vitres sales de notre "machina" pour ne rien rater. Les peaux sont tannées et les villages traversés semblent suspendus dans le temps et fondus au soleil. Après un changement de bolide à kochkor, à la croisée des chemins entre l'est et l'ouest du pays, nous gravissons cahin-caha les routes de terre et de pierre qui nous mènent à quelques 3.000 mètres d'altitude au bord du lac Son Kul. Nous arrivons à Tuz Ashuu, figés par le froid et la pluie, qui nous cache momentanément la beauté du paysage. Sabir-gul, littéralement patience-rose, matriarche du petit campement de yourtes que nous découvrons, nous accueille avec la bonne humeur qui ne la quitte jamais. On s'installe dans l'une des trois yourtes où la table est rapidement dressée, avec pour commencer des sucreries et des fruits secs, qui trôneront durant tout le repas. Cette charmante tradition, qui balafre les règles élémentaires de diététique, donne aux repas des airs de goûter d'anniversaire qui tranchent étonnement avec la rusticité de la cuisine kirghize.
La yourte est plus grande et haute que je n'imaginais. Nous ne connaissons encore que très peu de chose au sujet de cet art, l'entrée servie par des battants en bois, traditionnellement orientée au nord, les tapis enchevêtrés au sol, au sommet l'ouverture circulaire entrelacée, emblème du drapeau kirghize. Après le repas, nous nous enroulerons rapidement dans les matelas et couvertures. Réveillés le lendemain par les goutes de pluie traversant le toit de la yourte, nous passons la journée suspendus sous un ciel ombrageux, dans les va et vient de l'infatigable Sabir-gul, sa brue, et ses petits enfants. Ici les hommes sont presque absents, les femmes sont à la tâche. Traditionnellement, de mai à septembre, les éleveurs transmuent leur bétail, montons, vaches et chevreaux, dans les  "Jailo" ces pâturages verdoyants des hauteurs où prospèrent les animaux et s'érigent temporairement les yourtes. Ici point de troupeau, le campement est destiné au tourisme. Les campements proches sont eux dédiés au bétail, et aux touristes occasionnellement. Le lendemain le soleil dévoile le paysage : c'est somptueux. La chaîne de montagne érigée sur la rive qui nous fait face pointe ses pics enneigés dans les nuages, les eaux limpides du lac reflètent le soleil, un troupeau de chevaux galope librement le long des collines. Nous allons dans le campement proche de Toulouzebek, qui possède un troupeau de chevaux pour organiser notre prochaine étape : randonnée à cheval jusqu'à la rive sud du lac pour rejoindre par la route le village de Ak-tal puis Tash-Rabat en marchoutka.
Derya négocie âprement le tarif, par goût du jeu autant que du juste, découvrant au passage les joies de la linguistique kirghize. Nos chevaux comprennent rapidement que nous sommes de bien piètres cavaliers, et s'amuseront à nos dépens. 4 heures de beauté pure : le paysage est magnifique, sauvage, préservé, et immense.
À l'issue du temps convenu, notre guide nous laisse au beau milieu de la plaine. La route escomptée n'est pas visible à l'horizon, on nous a vaguement indiqué qu'elle était peut-être à l'est, mais qu'elle était probablement inutilisable. Le lac scintille à notre gauche à environ une heure et demie de marche, à l'est à environ une heure de marche nous apercevons un grand troupeau avec une yourte, il est 18h, il nous reste 2 heures pour trouver un toit dans cette splendide immensité. Alors que nous nous dirigeons vers l'est à la recherche d'un refuge pour la nuit, deux enfants virevoltant sur leurs chevaux approchent. Derya leur demande la route vers Ak-tal. Leur réponse incertaine m'inquiète, Derya leur demande alors asile. Nous passerons la nuit dans leur yourte au bord du lac : la famille élève un petit troupeau de vaches et de cheveux et accepte de nous accueillir pour la nuit. Nous avons été déçus qu'ils nous demandent de l'argent le lendemain, alors que nous comptions pourtant leur proposer spontanément.
[Rashan]


Commentaires

  1. Une semaine sans nouvelles, on s'inquiétait !
    Moi aussi j'vais voyager ... à Brest.
    Lao Tseu a dit : y a pas de petite destination que des grands voyages.
    J'suis deçu, j'suis hebergé mais y m'ont demandé de payer, d'avance même.
    Ca s'appelle chez Ibis.
    Bon ok, je sors.

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  2. Ils vous ont probablement demandé un dédommagement pour les ronflements peut-être.

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